Fromages Rocamadour

La monotraite et le stockage hors zone AOP sont désormais possibles.

Son goût n’a pas changé. Mais il a bien fallu s’adapter. Le 17 mars, à la demande du syndicat de l’AOP Rocamadour, l’INAO (Institut national de l’origine et de la qualité) validait une modification temporaire du cahier des charges du fromage de chèvre. « Ce qui a changé ce sont des éléments purement techniques pour les éleveurs », résume Benoit Bonizzoni, président de l’AOP Rocamadour. Plus exactement, pour faciliter le travail des producteurs qui voient leurs recettes s’effondrer depuis la crise du Coronavirus, deux nouveaux paramètres ont été revus : le stockage géographique et la traite.

« Au printemps, on a beaucoup de stocks de lait à gérer, on voulait pouvoir congeler ce lait caillé en dehors de la zone d’appellation car nos congélateurs, prévus pour des volumes habituels étaient déjà pleins vu qu’on a dû stocker d’autres produits dans l’urgence de la crise », explique le responsable. Une partie de cette production a pu ainsi être stockée à Brive, dans les congélateurs d’une entreprise privée.

En ce qui concerne la traite, elle peut désormais n’être effectuée qu’une seule fois par jour alors que jusqu’à présent, les chèvres devaient être traites deux fois par jour. « La mono traite permet de baisser le volume de lait produit », précise Benoit Bonizzoni.

Seulement 30 % de ventes

Cette pratique a été mise en place après avoir constaté que les ventes s’arrêtaient et donc, qu’il n’était plus utile de continuer à produire autant. « Il n’y a aucune conséquence sur la qualité du produit, le Rocamadour reste un fromage au lait cru moulé à la main et affiné dans la zone de l’AOP pendant six jours », souligne le président. Pas de différence donc pour le consommateur.

Pour les éleveurs, outre cette modification du cahier des charges, les conséquences de la crise sont désastreuses. Selon le syndicat de l’AOP Rocamadour, les producteurs ne vendent que 30 % de leurs produits en moyenne actuellement. « Certains ont déjà retrouvé 100 % de leurs activités grâce à de nouveaux circuits de distribution (lire ci-dessous), d’autres sont entre 50 et 60 % de l’activité, d’autres encore qui dépendent de l’activité touristique tournent péniblement autour de 30 % », explique-t-il. Ceux qui enregistrent le plus de pertes sont les producteurs qui passent par des grossistes pour alimenter les restaurants.

Et la crise est loin d’être finie. « Je suis inquiet pour certains producteurs, on serait très embêté de les voir cesser leurs activités », glisse le responsable. Selon lui, chacun a perdu plusieurs milliers d’euros et « ce qui n’a pas été vendu ne le sera pas plus tard ». Le cahier des charges reste allégé jusqu’au décembre 2020. D’ici là, les producteurs auront peut-être remonté la pente.

Manon Adoue La Dépêche