Gramat. Selon les experts : «Il n’y a pas de risques significatifs»

Suite aux conclusions de la mission ministérielle du CGEDD sur l’exploitation du méthaniseur de BioQuercy, démontrant une gestion conforme, le préfet va créer un observatoire de la méthanisation.

Bien loin de Gramat et de son méthaniseur, c’est dans les locaux de la sous-préfecture de Gourdon que Jérôme Filippini a restitué le rapport du CGEDD sur le site de méthanisation de BioQuercy, hier midi, à la presse.

Aux côtés du préfet du Lot et du sous-préfet Jean-Luc Tarrega, se trouvaient deux des inspecteurs de ce Conseil général de l’environnement et du développement durable diligenté par le ministère de la Transition écologique et solidaire. Leur enquête a conclu : «Il y a eu des dysfonctionnements objectifs au démarrage de l’exploitation de l’unité de méthanisation de Gramat en novembre 2017 ; mais des réponses ont été apportées pour résoudre deux problématiques majeures : les odeurs et les conditions de stockage du digestat.» Pour Thierry Galibert et Pascal Kosuth, inspecteurs généraux et membres du CGEDD : «Ce n’est pas en trois visites que nous pouvons faire une démonstration scientifique. Mais, pour les membres du CGEDD, chaque suspicion ou nuisance éventuelle rapportée par l’un de leurs interlocuteurs a été prise en compte : mortalité des abeilles, destruction de la micro-faune des sols, infiltration potentielle dans les sous-sols, pollution des eaux, etc.

«Les documents fournis et les investigations spécifiques font apparaître qu’il n’y a pas de risques significatifs.» «Si nous en avions constaté ne serait-ce que les prémices, il était de notre devoir de le faire savoir», précisaient-ils ensuite.

Création d’un observatoire scientifique participatif

Pour autant ils ont proposé que soit mis en place un suivi sur le long terme.

Jérôme Filippini suivant cette recommandation du rapport a donc annoncé la mise en place d’un observatoire scientifique participatif de la méthanisation aux membres de la Commission locale de suivi du méthaniseur de Gramat, auprès de laquelle il intervenait plus tôt dans la matinée. Étaient également présents les représentants du Parc naturel régional des Causses du Quercy, du Gouffre de Padirac, de Fermes de Figeac et d’autres acteurs du territoire conviés.

«Dans ce dossier du méthaniseur de Gramat, les exercices habituels de communication, de concertation et de transparence n’ont pas suffi. Pour garder une objectivité et ne pas tomber dans la surreprésentation, cet observatoire nous permettra de maintenir une vigilance et une réactivité, en permettant à chacun de faire état d’un fait observé non conforme ou semblant anormal… Et de permettre que la confiance se réinstalle.»

Une démarche novatrice qui sera impulsée en décembre

Un peu plus tard, il déclarait : «Peut-être qu’une sorte de désinvolture de l’entreprise au départ, a gâché les choses.»

Cet observatoire scientifique participatif est quelque chose d’inédit en France. Le préfet souhaite que dès le mois de décembre, le sous-préfet de Gourdon enclenche cette démarche qui reste à construire et à inventer.

Il rappelait enfin que «la méthanisation était l’un des processus d’énergie renouvelable à mettre en œuvre si on voulait diminuer notre consommation d’énergie fossile et nucléaire, et tendre vers nos objectifs environnementaux.»

Ce rapport de 40 pages n’a pas été transmis à la presse, il sera disponible en ligne sur le site du ministère ce mercredi.


L’enquête des experts sur le méthaniseur

Le rapport de 40 pages du CGEDD, Conseil général de l’environnement et du développement durable qui sera rendu public aujourd’hui, fait suite à trois déplacements de la mission ministérielle dans le Lot, en avril, en juin et en juillet. Elle a recueilli quelque 110 témoignages et entretiens, réalisé des visites de terrain et contrôlé les méthodes d’épandage et les modalités de gestion des intrants du méthaniseur.

«Sur le digestat, nous avons par exemple repris l’ensemble des auto-contrôles fait par BioQuercy auprès d’un laboratoire agréé sur 18 mois. Le digestat a toujours répondu aux normes, sauf pour trois mesures, tel qu’un PH à 8,5 au lieu de 8», précisait Pascal Kosuth, inspecteur général.

Sur les abeilles, ils ont comparé la mortalité entre différents territoires du Lot, pour aboutir à des chiffres quasiment identiques partout. Sur les intrants, ils ont contrôlé la nature (principalement du lisier de canard), la provenance (66 % de matières lotoises et 34 % de l’Aveyron, Dordogne, Tarn-et-Garonne).

Quant à leurs conclusions, elles formulent huit recommandations, dont une modification de l’arrêté préfectoral d’autorisation de BioQuercy intégrant les stockages de digestat chez les agriculteurs et la responsabilité de leurs conditions d’exploitation, ainsi qu’un suivi de l’ensemble des stockages de digestat. Ou encore, une amélioration de la traçabilité des entrées de produits et des sorties de digestat, avec l’identification et la localisation des fournisseurs et destinataires.

Laetitia Bertoni