Les circuits courts, c’est fini?

Cette crise sanitaire est un fléau supplémentaire dont l’agriculture lotoise se serait bien passée. Les filières cumulent les difficultés et le président de la chambre d’agriculture est inquiet pour les mois à venir. Il réagit.

Il y a eu les asperges, puis, les fraises, les melons encore… L’agriculture lotoise depuis le printemps et en ce début d’été est en pleine effervescence même si elle doit composer avec les difficultés nouvelles ou qui se sont intensifiées avec la crise du Covid-19.

Ainsi sur le besoin de main-d’œuvre, la situation semble moins critique qu’on pourrait le penser. C’est du moins ce que nous expose Christophe Canal, président de la chambre d’agriculture du Lot.

« Certes, pour la filière des asperges, cela a été compliqué. Sur les 250 à 300 tonnes de production annuelle, on est tombé péniblement à 100 tonnes. Si les producteurs locaux ont pu compter sur du renfort de proximité, avec leurs proches, leurs voisins, etc., hélas la productivité nécessaire au ramassage n’a pas été au rendez-vous de cette belle solidarité. »

Du côté du melon du Quercy, la situation semble maîtrisée en termes de récolte sans difficulté particulière signalée, assure le représentant de la chambre. Quant aux semences, elles sont un domaine qui fait surtout travailler des étudiants… « Nous ne sommes pas un département à gros besoin de saisonniers, reconnaît l’élu consulaire, contrairement au Tarn-et-Garonne. »

Autre enseignement à tirer de cette période particulière : des débouchés compliqués. « Il a fallu réduire la production au risque de devoir jeter. Les circuits courts et la vente de proximité ont un peu compensé la fermeture des restaurants. Mais je regrette de voir qu’à peine déconfinés, les commandes des Lotois sur de la vente directe chutent de moitié. »

Toujours pas de prix justes et rémunérateurs

Il poursuit : « L’agriculture départementale a su s’organiser dans l’urgence pour faire face. Désormais il faut qu’elle se fédère pour pérenniser toutes ces initiatives qui ont vu le jour pendant le confinement et qui ont du sens », insiste Christophe Canal.

Ensuite, sur la notion du prix de vente, le président de la chambre grince des dents. Impensable selon lui que les Français se soient réjouis de l’autosuffisance alimentaire nationale, d’une production sécurisée, qu’ils aient fait l’effort d’acheter local, sans que les agriculteurs ne soient payés à un prix juste et rémunérateur pour leur travail. « Il faut se souvenir de cela, se rappeler que quand on achète de la qualité, quand on produit de façon raisonnée sans détruire et assécher notre environnement comme dans d’autres pays, cela a forcément un coût. »

Il n’oublie pas enfin l’agribashing d’avant confinement qui a stigmatisé la profession.

« Les agriculteurs ont une capacité à faire le dos rond mais leur résilience a été atteinte. » Il rappelle que le prix du lait a perdu 30 à 40 € sur 1 000 litres. Mentionne l’impact sur l’agneau du Quercy, le Rocamadour, tous touchés de façon différenciée selon leurs débouchés… Il évoque la filière du canard qui a dû stocker, la filière viticole qui a connu le gel et la taxe sur les importations de vins aux Etats-Unis et puis le coronavirus.

« Il faut attendre septembre, conclut-il, mais je crains que certains agriculteurs et éleveurs décident de jeter l’éponge. »

Lætitia Bertoni La Dépêche