Que la question des droits des femmes soit au cœur du Grand débat


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La secrétaire d’Etat à l’égalité femmes hommes était invitée au Grand Débat sur le thème des droits des femmes, hier après-midi à Sainte-Livrade, pour une heure de questions-réponses devant 300 personnes.

«Je suis là pour parler des difficultés au quotidien, de fiscalité, de taxer davantage les grandes entreprises, pas pour assister à une réunion du planning familial.» S’il restait un doute sur l’utilité de placer les droits de femmes sur le devant de la scène du Grand Débat national, le premier intervenant à s’être emparé de la parole hier après-midi à Sainte-Livrade, l’a levé instantanément.

«C’est symptomatique d’une société masculine qui considère les problèmes des femmes comme secondaires», pestait à ce sujet Marlène Schiappa à l’issue d’un débat où les hommes en général ont eu du mal à laisser la parole aux femmes. La secrétaire d’Etat à l’égalité hommes femmes, très en verve, avait d’ailleurs lancé du tac au tac : «Je vais vous répondre sur la fiscalité, mais ça ne se fait pas ce que vous venez de faire. Des femmes viennent de prendre courageusement la parole pour raconter leurs vies et vous leur dites que ça ne vous intéresse pas.»

Ce qui avait visiblement agacé ce participant, c’est qu’un membre du gouvernement vienne «débattre» en mettant de côté les autres thèmes portés «depuis 13 semaines par les Gilets jaunes». Au vrai, si le débat, annoncé pour durer deux heures, n’a pas dépassé l’heure de questions-réponses, son thème en revanche autour des droits des femmes, n’était pas une surprise. Mais après 13 semaines de mobilisation, la venue d’un représentant du gouvernement suscitait des attentes plus larges.

En préambule, peu après 17 heures, Valentine 15 ans, «fille de divorcés», s’était fait la voix des enfants déchirés après une séparation : «Un enfant a besoin du soutien psychologique et financier de ses deux parents.» Après elle c’est Marie-Laure et Céline, deux mamans divorcées et actives, aux prises depuis plusieurs années avec la problématique de la monoparentalité et de la précarité économique qu’elle engendre, notamment pour les femmes seules, qui ont témoigné. Étouffées par le quotidien, se débattant avec les factures, les découverts, «la charge mentale des femmes actives, divorcées, surbookées», elles se sont engagées aux côtés des Gilets jaunes dès le 17 novembre : «Ça m’a énervé qu’un Gilet jaune justement fasse cette remarque sur le planning familial», confiait Céline après la réunion. «Ce thème, il concerne beaucoup de femmes dans le département et rejoint par beaucoup d’aspects les préoccupations et les revendications des Glest jaunes.»

Céline, elle, avait travaillé sur ses propositions remises à Marlène Schiappa : «Parler désormais de devoir de visite à son enfant et pas de droit ou encore suppression de l’autorité parentale pour le parent qui se rend coupable d’abandon d’enfant.»

La secrétaire d’Etat, sensible à la notion de «devoir de visite» a aussi déclaré vouloir soutenir le projet avancé par Céline et Marie-Laure d’un «contrat d’engagement à la parentalité», qui serait signé à la naissance d’un enfant par ses parents, «lors d’une cérémonie civile». Marlène Schiappa a également invité Valentine à porter la voix des enfants de divorcés, le 7 mars à Paris, lors de la «conférence inversée» où la parole sera donnée à des mères et des femmes âgées isolées.

Pour une partie des participants, venus parler des droits des femmes, le contrat est rempli. La ministre Marlène Schiappa, très à l’aise dans la prise de parole, a joué le jeu des questions-réponses. Limite de l’exercice, elle a souvent redit à Sainte-Livrade, les positions prises par elle et le gouvernement d’Edouard Philippe depuis juin 2017. Venue pour écouter, comme elle l’a répétée, elle n’était pas là pour donner raison à ses contradicteurs. Au mieux, les messages seront relayés. En ce sens, il était plus question de dialogue que de débat. D’ailleurs la forme choisie, questions en série du public et réponses exhaustives de la ministre avant de clore la réunion, ainsi que la durée, une heure seulement, interdisait le débat véritable.

«C’est plus possible»

Une dizaine de Gilets jaunes du Grand Villeneuvois avait fait déplacement dans le calme. Eux avaient envie de poser des questions à Marlène Schiappa, mais pas seulement sur le thème choisi des droits des femmes. Si la forme, entre coups de gueule au fond de la salle et questions hors sujet a pu agacer y compris parmi le public, à la décharge des Gilets jaunes, ils n’ont pas tous les jours une ministre à soumettre à la question. Avant le débat, Christophe, 42 ans, de Cancon, disait attendre des réponses claires à des questions claires : «A ce jour le gouvernement ne répond pas. Ça fait 13 semaines qu’on pose des questions à M.Macron qui en réponse nous renvoie un questionnaire. Que le gouvernement réponde aux questions du peuple et le peuple comprendra et peut-être restera un peu plus chez lui que dans la rue. On a des revendications qui ne sont pas entendues, pas respectées. C’est plus possible, on ne peut pas vivre comme ça. On peut vivre dignement, mais il faut que le gouvernement entende ce que le peuple a à dire.»


En chiffres

Selon les chiffres de la préfecture, 22 % des familles lot-et-garonnaises sont monoparentales et pour 34 % d’entre elles sans emploi. En outre 55,81 % des bénéficiaires du RS en Lot-et-Garonne sont des femmes et 54 % des femmes du département sont en situation de surendettement.

Jérôme Schrepf La Dépêche