A. Pradié remet un rapport sur les droits fondamentaux des personnes sous tutelle ou sous curatelle

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Après avoir été désigné par la commission des lois de l’Assemblée nationale, le député a mené une mission parlementaire sur les droits fondamentaux des personnes sous tutelle ou sous curatelle. La mission a été initiée à sa demande. Il livre le détail.

Comment s’est déroulée la mission ?

J’ai travaillé avec Caroline Abadie, députée LREM. Nous avons fait de nombreux déplacements. Nous nous sommes mis en immersion dans les tribunaux, les hôpitaux psychiatriques, les prisons. C’est un sujet très important dont on parle peu. En France 700 000 personnes sont concernées, elles sont un peu cachées. Elles vivent des situations violentes, agressives. Pour la première fois, on pose la question comment ces personnes sont respectées. Nous avons constaté qu’elles étaient plus affaiblies dans leurs droits fondamentaux que les autres personnes.

Avez-vous des exemples ?

Une personne sous tutelle ou sous curatelle n’a pas le droit de donner son sang, ça ressemble fort à de la stigmatisation. Les relations avec les banques ne sont pas les mêmes. Les personnes sous tutelle ou curatelle n’ont plus le droit de consulter leurs comptes. La formation de ceux qui exercent la fonction de mandataire n’est pas toujours satisfaisante, 65 % des mesures décidées par les juges sont faites alors qu’ils n’ont pas vu les personnes. A minima, il faudrait prévoir la communication au juge de l’évaluation des besoins de compensation de la personne par les équipes des maisons départementales de personnes handicapées si celle-ci a été réalisée préalablement à la demande de protection. On a beaucoup travaillé sur la formation des juges. Les personnes sous tutelle ou curatelle passent beaucoup à côté de leurs droits.

Que préconisez-vous ?

Il faut permettre par exemple au majeur vulnérable, à tout moment de la procédure d’instruction, d’exprimer son opposition à l’ouverture de la mesure et prévoir, dans ce cas, son assistance obligatoire par un avocat. Permettre au juge des tutelles de demander la désignation d’un avocat lorsqu’il l’estime nécessaire.

Avez-vous d’autres pistes ?

Nous avons opté pour un adjoint au défenseur des droits. Ce nouvel adjoint aurait accès dans les EPHAD, les établissements hospitaliers, les unités psychiatriques.


La synthèse en quelques points

À la rentrée, les deux députés vont rencontrer le ministre de la justice et de la santé pour lui remettre le rapport. Trente propositions y figurent. Ci-après quelques-unes d’entre elles.

Justice : placer les droits fondamentaux au cœur du contrôle administratif des mandataires judiciaires à la protection des majeurs. Renforcer significativement les moyens consacrés aux greffes pour le contrôle des comptes de gestion.

Formation : rendre obligatoire une formation initiale spécifique des médecins souhaitant être inscrits sur les listes établies par les procureurs de la République. Prévoir des réunions annuelles entre les juges des tutelles et les médecins inscrits sur les listes, à l’initiative des magistrats délégués à la protection des majeurs au sein des cours d’appel.

Autonomie : pour les majeurs dont l’altération des facultés est susceptible d’amélioration, faire de la main levée la finalité de la mesure afin d’orienter l’accompagnement du majeur protégé vers la préparation, le maintien ou le retour à l’autonomie.

Élections : rendre obligatoire pour chaque élection, la mise à disposition par les candidats d’une propagande électorale en «facile à lire et à comprendre» sous forme électronique.

Propos recueillis par Marielle Merly La Dépêche