Cahors-Capdenac : pour le train ou la voie verte ?

Le feuilleton de la voie verte sur la ligne ferroviaire entre Cahors et Capdenac délivre un nouvel épisode, avec enfin, un face-à-face entre un défenseur du retour du train et un fervent partisan de la voie verte.

Voie verte + voie ferrée

D’un côté, Didier Labeille, membre de plusieurs associations : Cahors l’humain d’abord, l’association pour la réouverture de la ligne Cahors-Capdenac-Figeac et le Gadel. Cet ancien enseignant en sciences et techniques industrielles du lycée Monnerville se bat contre le déferrement de la voie et plaide pour une complémentarité entre le train et le vélo. Cet habitant d’Arcambal doute de la pertinence d’une voie verte sur ce linéaire.

Tourisme et économie

En face de lui, Sylvain Ginier, porte-parole de l’association pour la voie verte en vallée du Lot. Ce batelier de Cahors voit dans la voie verte une formidable opportunité de rayonnement touristique et de développement économique pour le Lot. L’idée est de relier la voie verte lotoise au réseau national et européen, et plus localement, d’assurer la continuité avec les voies vertes de l’Aveyron et du Tarn-et-Garonne.

Une voie à l’abandon

Pour rappel, la ligne ferroviaire désaffectée concernée est celle reliant Cahors à Capdenac. Cette voie mesure 69 km. C’est le 26 septembre 1980 que le trafic de voyageurs a été interrompu. En 1985, l’association Quercyrail a relancé un train touristique entre Cahors et Capdenac. Le dernier a circulé le 28 décembre 2003. Depuis, la voie ferrée, détenue par SNCF Réseau, est inutilisée.

Quercyrail cherche à rouvrir à la circulation une portion de Cajarc à Tour-de-Faure. Un projet soutenu par le maire de Cajarc Jacques Borzo. En parallèle, le conseil départemental s’est engagé dans la création d’une voie verte, pour laquelle s’est positionné le Grand Cahors, mais pas encore le Grand Figeac. Au niveau de la région Occitanie, le vice-président chargé des transports, Jean-Luc Gibelin, penche pour un maintien du réseau ferroviaire. Le vice-président au tourisme, Jean-Louis Guilhaumon, soutiendrait la voie verte à condition d’un consensus entre les différentes collectivités.


Sylvain Ginier : un joyau pour le vélo tourisme

Association pour la voie verte en vallée du Lot. Porte-parole

Pourquoi la voie verte est-elle bénéfique pour le Lot ?

La voie verte est un vrai projet structurant pour le territoire, un développement économique réel. On se retrouve tout au nord de la nouvelle région, on est isolé, donc il faut vraiment aller de l’avant, innover. Il y a une vraie évolution économique autour du vélo-tourisme. Trouver un linéaire comme celui-ci, dans un site comme la vallée du Lot, avec Saint-Cirq-Lapopie au milieu, c’est le joyau ! Si voie verte il y a, c’est cette partie qui fera parler.

Un train touristique n’est pas viable ?

Un train touristique n’est pas viable ?

Les ouvrages d’art sont en très mauvais état sur la voie. Plus on attend, plus ce sera onéreux.

Soit on reste sur une hypothétique remise en marche du train, soit on se penche vraiment sur le sujet. Au niveau environnemental, le train va rouler au diesel, ça pollue. Et on va transporter quoi ? Il n’y a pas d’activité dans la vallée qui demande un transport de fret ou de voyageurs. Si la SNCF a arrêté les trains, c’est qu’elle a perdu sa rentabilité depuis longtemps. Oui, on engage 30 millions d’euros dans le projet, mais pour combien de retombées ? La voie verte, c’est une image qui marche. C’est une rentabilité qui n’existera jamais avec le train touristique.

La voie verte va-t-elle servir aux Lotois ?

On parle aussi de transports doux. Quand on faisait signer nos pétitions à Arcambal ou Mercuès, les gens ont dit qu’ils iraient bosser à vélo avec la voie verte, donc ça dépasse le cadre touristique. Aujourd’hui ils ne le font pas car les accès sont dangereux.

La voie verte va redonner du dynamisme économique aux petits villages, ramener des services. Pour la voie verte «Loire à vélo», c’est un million de passages (en 2015, ndlr), et je vous promets que la vallée du Lot va attirer aussi ! Ce sera une nouvelle clientèle. Et même s’il n’y a que 100 000 passages, combien de gens traversent ces villages aujourd’hui, à part en voiture ?


Didier Labeille : associer train et voie verte

Association pour la réouverture de la ligne Cahors-Capdenac-Figeac

Pourquoi vous opposez-vous à la voie verte ?

Je ne m’oppose pas à la voie verte, mais je suis contre le déferrement de la ligne. Il y a un potentiel extraordinaire à côté de la voie ferrée avec le chemin de halage. Notre association veut utiliser ce linéaire pour le train, en complémentarité d’une voie verte. Je suis aussi attristé de la voir se détériorer.

Un retour du train est-il crédible ?

Carole Delga (présidente de la région Occitanie) l’a dit, le train reste le meilleur outil de cohésion du territoire. C’est le meilleur moyen de déplacement avec un intérêt économique et environnemental. On peut redynamiser les relations entre Cahors et Figeac, redonner du lien avec ce bassin industriel. Nous avons un potentiel de développement touristique et économique plus large avec le train. Pour faire des trajets courts entre Arcambal, Saint-Géry et Cahors et enlever des voitures de la route. De plus, il y a 51 passages à niveau sur la voie. Comment va-t-on les sécuriser ? Il y a aussi 3,8 km de tunnel, on va les éclairer ?

Pour vous, la voie verte n’a pas un grand intérêt touristique ?

Pourquoi faire une voie verte alors qu’il en existe déjà partout ? Pourquoi on ne se sert pas de ce qui est déjà identifié dans le Lot, comme le chemin de Saint-Jacques ? Comment peut-on laisser à l’abandon des tranches de ce chemin comme entre Bouziès et Saint-Géry ? Cette voie verte ne traverserait aucun village et elle serait très enclavée. On ne pourrait pas voir le patrimoine depuis la voie verte. Le train est conforme à l’intérêt général. La voie verte ne servirait qu’en été, pas toute l’année. C’est une vision déconnectée de la réalité. Ce n’est pas parce qu’on fait une piste cyclable que tout le monde va se mettre au vélo. Il faut mettre toutes les idées sur la table et voir ce qui faisable. On est ouvert à tout ce qui peut porter haut le Lot.