Insolite en Bouriane

Vous connaissez tous cette carte postale en noir et blanc un peu jaunie par le temps « Bonjour du Périgord », illustrée d’une photo assez floue d’un fermier aidé de son cochon à la recherche de truffe. Il était courant à l’époque de se servir de cet animal pour caver cet or souterrain. C’était d’autant plus logique puisque tout le monde dans le Périgord possédait un cochon à l’étable. Le parfum d’une truffe est une chose qu’il ne faut pas apprendre à un cochon car il en est fou. L’inconvénient de cet animal par contre est qu’il est difficilement gérable et préfère se nourrir de l’objet trouvé plutôt que de le restituer à son propriétaire. Si d’aventure ce porcidé trouvait une truffe, le paysan pouvait tirer sur la corde aussi fortement qu’il le souhaitait, la majorité des précieux champignons atterrissaient dans l’estomac de l’animal. C’est une des raisons pour laquelle l’homme s’est ensuite intéressé au chien. Un chien est un animal bien plus docile qui détecte les truffes à distance. Il faut bien sûr le lui apprendre, mais un chien ferait tout pour plaire à son maître. Dès qu’il a compris que détecter l’odeur d’une truffe équivaut à une récompense, il deviendra un fidèle chercheur. Le gros avantage du chien est qu’il n’est pas friand de truffe et n’indiquera ces champignons que d’un coup de patte sans y toucher. Malheureusement, le chien présente aussi des inconvénients comme ne pas savoir différencier une truffe mûre d’une truffe qui ne l’est pas encore, il signale chaque truffe qu’il trouve. Lorsque une truffe encore trop blanche de chair a été déterrée, vous ne pourrez rien en faire. La remettre en terre ne sera pas une option car elle va pourrir. Vous comprendrez donc qu’un chien comme un cochon, chacun pour une raison, n’est pas le compagnon idéal pour le cavage de la truffe. Mais existe-t-il une autre alternative?

Il existe bien une autre alternative, un autre animal ou plutôt un insecte amateur de ce champignon; une mouche à la teinte rouge. Cela va peut-être vous surprendre d’imaginer remplacer un cochon ou un chien par une mouche, mais c’est un fait assez ancien. Les femelles de ces mouches déposent leurs œufs uniquement sur des truffes. Entre 20 à 30 œufs éclosent et les larves creusent pour se faire un nid dans ce champignon sous-terrain. Cette technique de cavage à la mouche est une très ancienne technique en France, mais qui demande une excellente vue et une forte dose de patience. Le caveur se positionne à un endroit où il suppose qu’il trouvera une truffe, généralement au pied d’un chêne dont la terre sur le pourtour semble aride, l’ainsi nommée terre brûlée. Il observe alors patiemment si une mouche ne vole pas dans le coin. Généralement la mouche effectue un vol circulaire, se pose plusieurs fois à un endroit précis puis s’envole à nouveau. Le caveur plantera alors une allumette à chaque place où la mouche s’est posée. Au centre du cercle ainsi dessiné, le caveur aura la garantie de trouver une truffe. Et une truffe mûre car la mouche ne souhaite pondre que dans celle-là.

L’institut
Malheureusement, le caveur de truffe moderne est aussi confronté à un problème. La technique de cavage à la mouche a depuis longtemps disparu et cette connivence idéale entre l’homme et l’insecte n’est plus. Les mouches modernes n’apprennent plus de leur mère comment être au service de l’humain, elles sont devenues aussi égoïstes que les gens d’aujourd’hui. Il était donc capital d’envisager une solution au cœur même du village truffier de Saint Pompon. Nous avons donc décidé d’y ouvrir un centre de formation, l’IIDMRT: l’Institut International de Dressage des Mouches à la Recherche des Truffes.
L’infrastructure de l’institut occupe une surface d‘un mètre carré et comprend une piste d’atterrissage équipée de manches à air. Les salles de classe se situent au sous-sol. Contrairement aux autres écoles, les portes sont rondes et si petites qu’elles excluent toute menace. Les portes sont protégées par du grillage et aucune fenêtre n’est apparente. Les coordonnées GPS de l’institut sont : 44°43’31.2″N 1°08’43.5″E, à gauche du Château Norbert à Saint Pompon.

Les cours
L’IIDMRT propose plusieurs cours de différents niveaux:
⦁ Cours de base pour jeune mouche
⦁ Différents cours de perfectionnement
⦁ Cours accélérés pour mouches éphémères
Les cours de base durent trois semaines, les étudiants seront logés et nourris durant toute la durée des cours. Les cours spécialisés sont élaborés sur demande et sur mesure, il n’existe donc pas de période prédéfinie. Les cours accélérés incluent trois leçons de 50 minutes et n’offrent aucune garantie pour l’avenir. À ce jour, aucune mouche éphémère ne s’est inscrite, il semblerait que la liste d’attente pose problème.
Les cours sont donnés par des professeures diplômées qui ont largement faites leurs preuves dans le domaine de la recherche des truffes.
Tous les cours (à l’exception des accélérés) sont clôturés par un examen théorique et pratique. Les élèves ayant obtenu un minimum de 80 points sur 100 recevront un petit diplôme ainsi qu’une petite médaille. Les diplômés auront la possibilité de chercher un caveur de truffe qui leur convient, l’institut est disposé à les aider dans leur recherche.

Les élèves
Quels sont les élèves prédisposés à suivre ces cours? Il s’agira surtout des mouches femelles de l’espèce Suillia. On dénombre neuf sous-espèces connues de Suillia et trois seulement seront aptes à suivre nos cours. Les Suillia humilis et Suillia fuscicornis sont des mouches d’une taille allant de 4 à 6 mm de longueur que l’on rencontre surtout dans le Sud-Ouest de la France. Ces dernières sont spécialisées dans la très réputée truffe du Périgord, la Tuber melanosporum. La Suillia gigantea, de plus grande taille, entre 9 et 14 mm, a une préférence marquée pour la truffe de Bourgogne, la Tuber uncinatum. On trouve généralement cette truffe et cette mouche dans l’Est de la France.

Inscription gratuite!
Vous pouvez inscrire vos mouches gratuitement, nous les mettrons sur liste d’attente. Les cours ainsi que le logement et le petit-déjeuner sont gratuits. Nous invitons cependant les propriétaires de mouche à verser un petit pourboire dans la cagnotte. Cet argent sera destiné à l’entretien de la piste d’atterrissage.

source: http://iidmrt.blogspot.com/