Pesticides, additifs, perturbateurs endocriniens… Comment bien choisir ses aliments

Vous avez envie de croquer dans cette belle pomme ? Halte-là ! Si elle n’est pas bio, il va falloir la nettoyer pendant un quart d’heure sous l’eau avec du bicarbonate de soude. C’est la méthode la plus efficace pour enlever les pesticides, selon une étude de l’université du Massachusetts, relayée par plusieurs médias jeudi 26 octobre. Difficile, aujourd’hui, de faire ses courses sans acheter des produits qui contiennent différentes substances nocives pour la santé, des pesticides aux perturbateurs endocriniens en passant par les additifs et les conservateurs.

Pourtant, différentes applications permettent de scanner les codes-barres ou les étiquettes pour vérifier la qualité sanitaire et nutritive des aliments trouvés dans un supermarché. L’une des plus recommandées actuellement est Yuka, qui passe au crible différents critères, dont la présence d’additifs et l’origine bio ou non des produits. Mais pour les courses en ligne, il faut savoir lire la composition et avoir les bons réflexes. Alors que les Etats généraux de l’alimentation se tiennent jusqu’en novembre en France, franceinfo vous aide à minimiser les risques, avec l’aide de deux spécialistes.

La viande et le poisson

Pas simple de se passer de jambon dans la semaine, un aliment pratique et sans préparation. Mais la présence de nitrites, utilisés comme conservateurs, favorise les risques de cancer colorectal (+18%) si la consommation dépasse 50 g par jour (soit deux tranches). Problème, le jambon sans nitrites en magasin bio est très cher. Deux marques de la grande distribution s’y sont mises : Herta et Fleury-Michon. « Notre étude a prouvé que ces jambons tenaient leurs promesses », observe Marie-Noëlle Delaby, journaliste à Que Choisir en charge des questions d’alimentation. L’autre solution est d’opter pour du jambon à la coupe, qui contient moins de nitrites que les jambons sous vide.

Côté viande, le mieux est d’aller vous faire plaisir une fois par semaine chez votre boucher, qui pourra vous renseigner sur l’origine de la bête et son alimentation. « Une bonne viande, c’est d’abord des animaux de qualité élevés lentement, mis en pâture à l’herbe plutôt que nourris au soja ou au maïs OGM », prévenait dans L’Express Pierre Bouchez, éleveur installé dans le Pas-de-Calais. Si vous n’avez d’autres choix que d’acheter votre viande sous vide en supermarché, privilégiez l’origine française et les labels. L’étiquetage ne mentionne pas l’alimentation mais le sigle AB garantit, normalement, une alimentation sans OGM. Le label Bleu-Blanc-Cœur, lui, indique que les animaux ont reçu une alimentation riche en oméga-3 (graines de lin, luzerne, herbe). Le label rouge prévoit aussi dans son cahier des charges une alimentation dominée par l’herbe pour les bovins.

S’agissant du poisson, « le mieux est de ne pas en manger plus d’une à deux fois par semaine, comme la viande rouge », recommande Sandrine Gras, porte-parole de l’association Générations cobayes. En cause, la présence de métaux lourds, des « neurotoxiques », dans de nombreuses variétés. Ces perturbateurs endocriniens sont particulièrement présents dans les poissons gras, comme le saumon. « On prépare un dossier pour le mois de décembre sur le saumon », souligne Marie-Noëlle Delaby, journaliste à Que Choisir.

Nous avons clairement établi que cela ne sert à rien de se tourner vers du saumon bio ou label rouge car ils sont les plus lourdement contaminés en métaux lourds et en polluants organiques persistants comme les PCB.

Marie-Noëlle Delaby

à franceinfo

Autant acheter de temps en temps un bon saumon d’élevage, « de préférence en provenance d’Ecosse, qui pratique moins la pisciculture intensive qu’en Norvège », complète Sandrine Gras. Le saumon sauvage, lui, « n’est pas très qualitatif en termes de goût, à moins d’y mettre vraiment le prix », précise Marie-Noëlle Delaby. 

Pour les autres poissons, mieux vaut privilégier les petits, comme les sardines et les maquereaux. En début de chaîne alimentaire, ils sont donc moins contaminés. « Si vous n’avez pas le temps de cuisiner, il est donc préférable d’opter pour ces poissons, même en boîte, plutôt que pour du thon, par ailleurs menacé par la surpêche », souligne la journaliste spécialisée.

Les fruits et légumes

Si vous n’avez pas les moyens d’acheter tous vos fruits et légumes au rayon bio, concentrez vous au moins sur ceux qui sont les plus contaminés par les pesticides. « Ce sont généralement ceux dont la peau n’est pas épaisse et qui sont plus exposés aux pulvérisations de pesticides en raison de leur mode de culture », explique Sandrine Gras. La Direction générale de l’alimentation (DGCCRF) et l’Institut français de l’alimentation (Ifen) les ont listés et ils sont au nombre de 12. Pour les fruits, il s’agit des pêches, des pommes, des nectarines, des fraises, des cerises, des raisins et des poires. Pour les légumes, sont concernés les poivrons, le céleri, le chou frisé, la laitue et les carottes.

A l’inverse, les oignons, les avocats, le maïs doux, l’ananas, la mangue, l’asperge, les petits pois, le kiwi, l’aubergine et la papaye, la pastèque, le brocoli, la tomate, la patate douce sont les fruits et légumes les moins contaminés par les résidus de pesticides. Ils peuvent donc être consommés en provenance de l’agriculture traditionnelle.

Le mieux est d’acheter ses fruits et légumes, bio ou non bio, en circuits courts, auprès d’amap ou de réseaux comme la Ruche qui dit oui.

Sandrine Gras

à franceinfo

Si c’est trop compliqué, vous pouvez toujours vous rabattre sur le bio en grande surface, même si les produits sont souvent présentés sous film plastique (qui contient, lui aussi, des perturbateurs endocriniens).

Autre option, le surgelé. « Si on n’a pas trop le temps de cuisiner, il est préférable de prendre des légumes surgelés plutôt que de les laisser trop longtemps dans le bac à légumes. Au bout de trois jours, ils commencent à perdre leur valeur nutritive », observe Marie-Noëlle Delaby. Là encore, le bio est préférable. Dernière solution, la conserve. La présence de conservateurs, dont le sel, n’est pas idéale. Préférez les bocaux en verre, qui évitent que les légumes soient en contact avec l’aluminium et le plastique qui recouvrent l’intérieure des boîtes. « Etant donné qu’elles sont chauffées à très haute température pour la stérilisation, cela facilite la migration de nanoparticules dans les aliments », prévient Sandrine Gras.

Les produits laitiers et les œufs

Pour le lait et ses dérivés, les yaourts et le fromage, mieux vaut opter pour du bio. Les vaches des élevages traditionnels sont en effet majoritairement traitées aux hormones et aux antibiotiques. Elles sont également nourries avec des céréales et du fourrage non bio, qui contiennent donc des résidus de pesticides.

Idem pour les œufs. Non seulement les poules sont nourries avec une alimentation (essentiellement des graines) qui ne provient pas de l’agriculture biologique et qui peut donc contenir des pesticides, mais elles vivent dans des conditions d’élevage plus ou moins intensif. Le moyen le plus sûr de se repérer est de regarder le code sur l’œuf : 0 pour les œufs bio (au moins 2,5 m² par poule en extérieur et alimentation bio), 1 pour les poules élevées en plein air (au moins 2,5 m² par poule en extérieur), 2 pour les poules élevées au sol (élevage intensif, 9 poules par m²), 3 pour les poules élevées en cage (18 poules en cage par m²).

Les gâteaux et les céréales

Si vous retournez votre paquet de gâteaux et que vous voyez une liste interminable d’ingrédients, à base de « E » en tout genre, reposez-le en rayon. Sandrine Gras est catégorique : pour les produits à base de farine de blé et de canne à sucre, dont font partie les biscuits, les céréales mais aussi les pâtes, mieux vaut privilégier le bio pour éviter les résidus de pesticides. En outre, de nombreux additifs viennent se glisser dans la composition des plaisirs sucrés, qu’il s’agisse de colorants, d’édulcorants ou de conservateurs. L’association Générations cobayes récapitule ci-dessous les additifs alimentaires à éviter.

Le site Générations cobayes a listé les additifs alimentaires à éviter.
Le site Générations cobayes a listé les additifs alimentaires à éviter. (GENERATIONS COBAYES)

Pour ce qui est de la qualité nutritionnelle, des biscuits à base de sucre (mais pas trop) et de beurre seront meilleurs pour votre santé que ceux qui contiennent du  sirop industriel de glucose-fructose et de l’huile de palme, riche en acides gras saturés. Leur consommation excessive augmente les risques de diabète et de maladies cardiovasculaires. Attention aussi à la quantité de sel, dont la consommation ne doit pas dépasser 5 g par jour pour un adulte. Enfin, « les sucres blancs étant vides sur le plan nutritionnel, essayez les pâtes semi-complètes ou fabriquées à partir d’autres céréales que le blé », conseille Sandrine Gras.

Les boissons

Qu’ils soient entiers ou transformés en jus, les fruits contiendront toujours moins de pesticides s’ils sont issus de l’agriculture biologique. « Et vous aurez moins de chances de trouver des colorants et des arômes artificiels si vous évitez le jus de fruit concentré », rappelle Sandrine Gras. Quant aux sodas, mieux vaut restreindre leur consommation à la portion congrue.

Pour ce qui est du vin, le label bio ne signifie pas l’absence de sulfites, un conservateur qui peut être responsable d’allergies ou de maux de tête, mais au moins de pesticides. Dans votre bouteille de vin traditionnel, vous pouvez retrouver « un cocktail de 10, 11, 12 pesticides, dont certains interdits en France », alerte Antonin Iommi-Amunategui, dans une tribune sur L’Obs.

Les viticulteurs ajoutent au moment de la vinification jusqu’à 70 additifs et des intrants chimiques, précise cet écrivain, passionné par le vin naturel. Réalisé à partir de raisins bio, le vin naturel est exempt de tous ces produits. La bouteille est un peu plus chère, autour de 10 euros, mais cela vaut le coup d’essayer, non ? L’appli Raisin répertorie tous les endroits qui proposent du vin naturel à la vente.

Franceinfo