Des chevreuils ivres aux portes des maisons

Qu’est-ce qui perturbe ces chevreuils que l’on voit désorientés près des maisons ? L’amour ? Non, l’alcool ou plutôt les effets de substances alcaloïdes présentes dans certains bourgeons. Les chevreuils en raffolent. ça les rend tous fous… et saouls.

L’hiver est fini. Bonjour l’ivresse. à l’heure où certaines plantes et arbustes préparent lentement leur éclosion, les chevreuils s’offrent des apéros-bourgeons qui les rendent ivres de plaisir et leur font totalement perdre leur self-control. Au point de paraître hébétés au bord des routes, d’errer aux portes des villes et même tout près des maisons.

Ce n’est pas la soif d’évasion qui déclenche en eux ce type d’attitude inhabituelle dont de nombreux Lotois ont été témoins, mais bel et bien des végétaux dont cet animal est très friand au début du printemps.

Serge Gay, vice-président de la fédération de chasse du Lot, connaît très bien ce phénomène prêtant à ironiser, mais qui peut-être aussi à l’origine d’importantes dégradations. «Ce n’est pas une légende. J’ai lu plusieurs études expliquant ce comportement étonnant des chevreuils qui s’approchent des maisons, alors que normalement c’est un animal très craintif. Il semblerait que la consommation de ces bourgeons contenant des substances alcaloïdes altère leur perception de l’environnement. Les chevreuils subissent les effets euphorisants de ces végétaux un peu comme une drogue», analyse Serge Gay.

Ils ont «l’alcool mauvais»

«L’animal se sent bien, il n’a plus de notion de danger et ne perçoit pas forcément la présence de l’homme», poursuit le vice-président des chasseurs. «Nous n’avons pour l’instant jamais eu d’explication scientifique s’opposant à cette réalité constatée qui n’arrive réellement qu’au printemps lorsque ces bourgeons réapparaissent. Cela corrobore nos propos» dit-il. Une réalité préoccupante car les chevreuils ont «l’alcool mauvais» et se laissent un peu aller au cours de leurs errances urbaines où ils saccagent des plantations.

Un souci pour le vignoble

«Nous rencontrons surtout un gros problème au niveau des vignes lorsque les chevreuils viennent y consommer des bourgeons. Cela peut provoquer la mort des jeunes plants qu’il faut ensuite remplacer. Cela coûte très cher. ça peut aussi avoir un effet sur la production de la vigne adulte et donc impacter carrément la qualité du raisin», s’inquiète Serge Gay.

«C’est un souci majeur car la population de chevreuils est devenue très importante dans le Lot. Nous en dénombrons environ 30 000. Nous devons protéger les vignes. Le vignoble de Cahors et le secteur de Luzech sont directement concernés. Durant ces trois prochaines années, nous allons veiller à réaliser des prélèvements plus importants sur ces zones sensibles», prévoit-il. Les sociétés de chasses ont, en effet, l’obligation (sous peine d’amende) d’effectuer un certain nombre de prélèvements afin de réguler la population de chevreuils dans le département.

La préservation des plateaux viticoles en dépend.

En bref, la consommation d’un vin de qualité dans le vignoble dépend de la sobriété de cet animal qui doit éviter d’errer ivre près des vignes et de les dégrader. Moralité : tout chevreuil qui se «cerf» un apéro-bourgeons doit le faire avec modération.