LGV. Le Département paiera 29 millions d’Euro. Position de Francesco Testa

L’appel à participation du Département du Lot, à payer 29 millions d’€ sur 40 ans, pour la LGV Bordeaux-Toulouse, a été validé par les élus (27 Pour – 6 Abstentions et 1 Contre).

Lundi 13 décembre 2021, les élus du Département du Lot se sont prononcés en faveur du projet de LGV Bordeaux-Toulouse avec contribution « théorique » pour le Département du Lot à hauteur de 29,4 millions d’€. Retour sur un débat de fond (et de fonds)…

Lors de la séance du conseil départemental du 15 novembre 2021, les élus avaient voté une motion en faveur de la défense de la ligne POLT et du soutien au Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO). En effet, les collectivités locales participeraient à hauteur de 40 % au financement du projet, soit 4,1 milliards, d’€ dans la première étape (phase Bordeaux Toulouse), aux côtés de l’État engagé pour le même montant (4,1 milliards d’€) et de l’Europe pour 2,05 milliards d’€ (soit 20 %). Serge Rigal président du Département du Lot a appelé à approuver ce plan de financement après avoir rappelé les enjeux de ce dossier, qui s’inscrit dans un programme de desserte ferroviaire d’intérêt national.

D’emblée, Serge Rigal rappelle le sens de l’adoption de la motion votée à l’unanimité le 15 novembre dernier : « Par cette décision, les élus départementaux ont souhaité lier l’engagement du Département du Lot au sein du Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest à une amélioration notable de l’accès des Lotois au réseau ferroviaire. Il s’agit de conjuguer les liaisons à grande vitesse et les dessertes directes (via la ligne POLT) et locales (par le maintien des gares de proximité et une attention renouvelée au réseau TER). Le désenclavement de notre territoire passant également par une liaison régulière avec la future gare TGV de Bressols ». Serge Rigal défend la participation du Département du Lot, estimant que celle-ci est « intrinsèquement liée à des actions en faveur du désenclavement ferroviaire du Lot ».

Un projet d’intérêt européen

Serge Rigal insiste sur les enjeux de ce projet qui dépasse à la fois le Lot et même la région Occitanie, puisqu’il fait partie d’une ligne reliant l’Espagne. Le Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO) est un projet ancien, évoqué pour la première fois en 1991 lors d’un Conseil interministériel d’aménagement du territoire et confirmé en 1992 par son inscription dans le schéma national des liaisons ferroviaires. Il doit permettre de relier l’Atlantique à la Méditerranée par une liaison à grande vitesse, de répondre à la saturation du réseau existant, de développer le transport régional de voyageurs et le fret. Le Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO) porte sur les axes Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Espagne.

Plusieurs projets dans le schéma

Ce schéma d’intérêt européen est composé de plusieurs projets, indique Serge Rigal, qui en donne les grandes lignes :

– la création des lignes nouvelles à grande vitesse Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax sur 327 km de section courante, possédant un tronc commun de 55 km entre le sud de Bordeaux et le sud Gironde. Ces lignes nouvelles se raccordent au réseau ferré national au sud de Bordeaux et au nord de Toulouse, ainsi qu’au nord de Dax ;

– la réalisation des aménagements ferroviaires de la ligne existante Bordeaux-Sète au sud de Bordeaux (AFSB) sur 12 km, entre Bègles et Saint-Médard-d’Eyran

– la réalisation des aménagements ferroviaires de la ligne existante Bordeaux-Sète au nord de Toulouse (AFNT) sur 19 km, entre la gare de Toulouse-Matabiau et Castelnaud’Estrétefonds ;

– la création de la ligne ferroviaire nouvelle Dax-Espagne sur 91 km, ligne mixte voyageurs/fret se raccordant aux précédentes et à la ligne nouvelle espagnole VitoriaBilbao-San Sebastián, dénommée « Y Basque », actuellement en travaux, à la frontière franco-espagnole à Biriatou.

Un projet hasardeux pour l’avenir ?

Comme s’il s’agissait à ses yeux de faire passer la pilule de la participation du Lot au financement de la LGV Toulouse – Bordeaux, Francesco Testa dénonce le lien soudainement établi, selon lui, par le président Serge Rigal avec les aménagements de la ligne POLT. « Trouverait-on un paragraphe, une ligne, quelques mots épars où il est écrit que le projet ferroviaire du Sud-Ouest a pour but, même si c’est bien dissimulé, de défendre la ligne POLT ou de proposer la rénovation de la ligne POLT ? » se demande l’élu.

Se référant au dossier, Francesco Testa relève que le projet de la LGV relève uniquement du rapprochement entre les métropoles de Toulouse et Bordeaux, prenant en compte la spéculation foncière, poussant les habitants à s’installer de plus en plus en périphérie alors que la saturation automobile est liée à l’absence de transports collectifs fiables adaptés.

À ce sujet, observe-t-il, l’État s’est engagé à mettre 2,8 milliards par an sur 10 ans, pour la « dé saturation » des grands nœuds ferroviaires, à savoir le nord Toulousain et le sud Bordelais. Selon les chiffres avancés, ce projet global serait chiffré à 17 milliards d’€.

L’élu évoque une situation personnelle pour illustrer son propos. « Ma fille le dimanche 28 novembre dernier devait arriver à Cahors à 22 h 30. Or, le train s’est arrêté à Saint-Jory et elle a dû terminer sa route en bus pour arriver à Cahors à 1 h 30 ; voilà la réalité des usagers de ce bout de ligne POLT. » Ce témoignage n’est pas un fait isolé, d’autres péripéties de ce genre sont régulièrement rapportées par les usagers sur cette même ligne POLT.

L’élu consent toutefois à reconnaître le bénéfice de l’amélioration de la ligne POLT au nord de Toulouse, dans la mesure où il est acquis que celle-ci s’étirera jusqu’à Cahors. Pour autant, Francesco Testa répète que ce processus d’amélioration de la ligne existante n’est pas lié à la LGV. Il se positionne ensuite au regard du niveau de la fréquentation des TGV, selon des données statistiques.« Les employés, ouvriers, professions intermédiaires qui comptent 45 % de la population de plus de 18 ans, ne représentent que 19 % des usagers du TGV, soit moins 1 sur 5 »,précise-t-il.

Francesco Testa appelle l’assemblée départementale à assumer en transparence, il indique : « Ce projet que le Département du Lot soutient, ne concerne que 10 % des usagers des trains ». Selon ces mêmes statistiques, les principaux bénéficiaires de cette LGV dont le coût serait estimé à 14 milliards d’€, seront des cadres supérieurs, circulant d’une métropole à l’autre.

« Nous sommes contre ce projet de ligne LGV parce que nous sommes favorables à un projet de train rapide qui mettra 20 minutes de plus et qui coûtera moitié moins cher. Nous demandons à prioriser la rénovation des trains du quotidien qu’empruntent les 90 % des usagers et la ligne POLT en fait partie » insiste Francesco Testa. Il en vient à la dimension du projet qui commence à faire grincer des dents et il invite le Département à mettre en place un sondage sur le sujet, d’autant plus, relève-t-il, « que personne n’a mis dans son projet de campagne pour les élections Départementales, qu’il souhaitait que le Département verse 20 millions d’€ et plus pour financer la LGV ». Il enfonce le clou et pose la question : « Comment expliquer aux habitants du monde rural, qu’il va falloir payer 10 % de ce projet, via une taxe ? » Silence de cathédrale dans l’hémicycle.

Une taxe pour les habitants situés à moins de 100 km du TGV

La Région et les Départements se sont coordonnés pour financer les 2 milliards d’€ que représente le coût de cette ligne, en partant sur un étalement de 40 ans. Par ailleurs, est mise en place une taxe, à la demande de la Région et des Départements, pour toutes les personnes physiques et morales assujetties à la taxe foncière, à la CFE des entreprises, à la taxe d’habitation pour les maisons secondaires… sur les communes situées à moins d’une heure de voiture ou 100 km de la ligne TGV, pour un produit attendu de 24 millions d’€ par an, pendant 40 ans. « On va taper sur des personnes qui n’utiliseront le TGV qu’à la marge peut-être une ou deux fois par an et pour certaines jamais ! », s’indigne-t-il

En résumé, Francesco Testa, qualifie ce projet « de hasardeux, aberrant financièrement, écologiquement, économiquement, sociologiquement, absorbant sur les 30 ans à venir, toutes les finances locales ». Derrière ce projet, Francesco déplore un évitement du Lot, qui risque de mettre à mal l’unité départementale avec les habitants du sud se tournant vers la métropole toulousaine et ceux du nord vers Brive. N’est-ce pas déjà un peu le cas ? Francesco Testa a voté contre l’approbation de ce dossier et six autres élus se sont abstenus : Alfred Mathieu Terlizzi, Gaëligue Jos, Véronique Arnaudet, Régis Villepontoux, Jean-Pierre Jammes et Dominique Bizat. Il n’est pas sûr que le dossier en reste là !

Actu Lot Jean-Claude Bonnemère