une Américaine fait don d’un souvenir de son père au musée de la Résistance

C’est le deuxième don de Donna Wakeman au Musée de la Résistancede Cahors. L’an dernier, elle avait remis un rapport de mission de son père qui a permis d’apporter des informations sur l’engagement des forces alliées auprès des maquis dans le Lot. Cette année, elle récidive et elle a officiellement remis ce lundi 24 juillet 2023 un autre souvenir au Musée : une carte d’identité avec un faux nom « Jean Bordeaux, né le 31 août 1913 dans le Calvados », qu’utilisait son père en mission en France.

« Je veux que cette relique de la Seconde Guerre mondiale soit conservée dans un endroit où elle sera honorée et où elle aura une signification particulière pour ceux qui la verront. Il n’y a pas d’endroit plus approprié que ce musée, sur les lieux mêmes où mon père s’est battu » précise Donna Wakeman.

Parachuté dans le Lot en 1944

Son père, l’officier William Daniels, a été parachuté dans la nuit du 29 au 30 juillet 1944 dans le Lot sur le terrain Bouleau entre Carennac et Miers, en compagnie d’un autre soldat américain, Guy Songy. Tous deux ont été envoyés en France pour soutenir et apporter des médicaments à Georges Hiller, officier britannique blessé dans l’embuscade de Gramat du 22 juillet 1944 (dans laquelle se trouvait également Malraux), lui-même parachuté avec l’officier Watney sur le même terrain que William Daniels.

William Daniels, alias Capitaine Dick de son nom de guerre, est ensuite resté en soutien des maquis lotois, en particulier ceux du groupe Vény, pour leur apprendre à manipuler les armes et surtout les explosifs dont il était spécialiste. « Le département du Lot a été pourvoyeur de nombreux maquis, précise Emmanuel Carrère, référent du service Patrimoine du Musée, il y en a eu jusqu’à 18 dans le Lot. Jusqu’en 1943 ils étaient sous-équipés. En 1943, les Alliés comprennent l’intérêt de parachuter du matériel et des agents pour former les Résistants et à l’approche du Débarquement, ces parachutages étaient nombreux ». Le capitaine William Daniel quitte la 101e Division aéroportée en 1944 pour rejoindre les forces spéciales américaines OSS et être envoyé auprès des Résistants. En tant que Cajun de Louisiane, il parle français et peut donc communiquer pour leur enseigner les techniques militaires et manipulation d’armes. En 1944, il poursuit ensuite d’autres missions dans le Tarn, l’Aveyron, les environs de Grenoble…

Une fois la guerre terminée, il reviendra au moins à deux reprises dans le Lot, dans les années 50 avec sa famille puis en 1965 où il a participé à des cérémonies commémoratives, notamment celle du 8 mai à Gourdon.

Le futur Musée de la résistance se précise

Cette fausse carte d’identité était depuis toujours dans la famille de Donna Wakeman qui se rappelle avoir joué avec étant petite. Aujourd’hui, elle rejoint les autres pièces mémorielles du Musée de la Résistance, dont l’ouverture est prévue en 2025 à l’étage du cinéma Le grand palais.

Ce musée va développer 8 grandes thématiques, et parmi elles « Les Résistances » dans laquelle une sous-thématique « Les Alliés au secours des maquis » sera abordée. Cette pièce, avec le rapport de mission du Capitaine Dick mais aussi le container de parachutage de médicaments pour le capitaine Hiller également en possession du Musée permettront d’abonder cette thématique. « Dans le Lot, à la Libération, on n’a pas vu de colonnes de Jeep… La libération s’est faite avec les Résistants, les seuls Alliés qui sont venus sont arrivés du ciel comme Hiller, Watney, Guy Songy et le capitaine Dick » précise Emmanuel Carrère.

D’autres projets sont en cours pour l’année prochaine afin de rendre hommage à ces soldats alliés venus soutenir les maquis lotois, notamment un en lien direct avec le parachutage de William Daniels et Guy Songy. Le Musée de la Résistance travaille également pour diffuser un film « Now it can be told », sur le soutien des Alliés à la résistance française pour les 80 ans du Déparquement en 2024. L’association du musée monte de son côté, en partenariat avec la ville de Cahors, une exposition qui mettra en évidence les réseaux de résistance civile à Cahors pour cacher les personnes recherchées (hors Justes parmi les Nations). L’idée est de faire vivre ce musée avant son ouverture de 2025.

Marie-Cécile Itier Actulot.fr

crédit photo et légende : Donna Wakeman au centre, tenant la fausse carte d’identité de son père, entourée des membres de l’association du Musée de la Résistance, avec Emmanuel Carrère du Service patrimoine et l’élue de Cahors en charge des musées Sylvie Caroff. ©T. S.

Le Musée de la Résistance devrait ouvrir en 2025

Après 26 ans d’activités le musée a fermé ses portes en 2018 lors du lancement du projet de réhabilitation de la place Bessières avec la construction du complexe cinématographique.

Ses locaux ont été détruits, et les collections ont été stockées dans un bâtiment non loin de là. À ce moment-là, la Mairie de Cahors avait assuré que le musée rouvrirait dans un nouvel espace. « Ce musée devait évoluer, poursuit le maire, mais on n’imaginait pas alors que ce serait si long, et je remercie l’association du musée de la résistance pour sa patience ! »

Aujourd’hui, alors que le musée Henri-Martin, projet phare sur lequel la municipalité a choisi de se concentrer, a rouvert ses portes, celui du Musée de la Résistance peut enfin prendre le relais et voir l’horizon s’ouvrir à lui. Avec une ouverture au public espérée pour 2025-2026.

À l’étage du complexe cinématographique

Le musée prendra place comme prévu au départ à l’étage du complexe cinématographique du Grand Palais, avec une entrée indépendante. Sur une surface de 300 m2, une muséographie et une scénographie avec l’utilisation des dernières technologies verront le jour. Outre un espace d’exposition, une partie restera consacrée aux réserves et à la conservation d’une partie des collections. Un espace de réunion est également prévu.

Dès l’accueil du musée, le visiteur rentrera dans le vif du sujet avec un hommage à Pierre Combes. Sous un très grand portrait de l’ancien résistant, une table tactile permettra de retrouver le musée tel qu’il était à l’époque des deux pavillons mais aussi de présenter son contenu aujourd’hui. Un ascenseur permettra d’accéder à l’espace muséographique à proprement parler à l’étage, tandis que les escaliers seront aménagés et largement illustrés pour faire un saut dans le temps et remonter aux origines de la seconde guerre mondiale en partant de la guerre de 1870 et la perte de l’Alsace-Lorraine, en passant par la Première guerre mondiale…Vidéos : en ce moment sur Actu

La réalisation de la muséographie sera confiée en interne au Service Patrimoine de Cahors, sous la coordination d’Emmanuel Carrère, animateur de l’architecture et du patrimoine et désormais référent du projet du Musée de la Résistance.

Inventaire des collections

Durant la fermeture du musée, l’association ainsi qu’une équipe de professionnels qui se sont succédé ont procédé au chantier des collections avec inventaire des objets, constat d’état, conservation préventive, classement des archives… La totalité du fond d’objets a été traitée (excepté ceux rentrés récemment), et 20 % des archives ont été classées. Depuis 2020, entre crise covid et ouverture du musée Henri-Martin, ce chantier des collections a été interrompu, seul le travail d’archivage s’est poursuivi. La reprise de ce travail doit aboutir en 2022 à l’achèvement des inventaires et au classement des objets, archives et fonds documentaires. Puis en 2023, le projet culturel du futur musée sera établi avec l’aide d’un comité scientifique tandis que les recherches historiques permettront d’approfondir certaines thématiques.

Le musée gardera sa vocation et ne traitera pas seulement de Cahors et des environs mais bien de la résistance dans la totalité du département du Lot, où de nombreux faits de résistance ont eu lieu (Lamothe-Cassel, Gabaudet…). Par ailleurs, l’esprit des résistants fondateurs perdurera et le musée se voudra un espace vivant. Il ne sera pas seulement un espace d’exposition, mais un véritable centre de médiation qui accueillera de nombreuses classes. Serge Rigal, président du Département du Lot, partenaire du projet, souhaite d’ailleurs que la totalité des élèves de 3e puisse visiter ce musée, et ce dès son ouverture.

Enfin, de par son site d’implantation, la Municipalité souhaite qu’un partenariat se tisse entre le cinéma Le Grand Palais et le musée pour des projections autour de la Seconde Guerre mondiale.

ActuLot Par Marie-Cécile Itier Publié le 17 Juin 22