ENTRETIEN. Le Lotois Christian Borie est président de la Fédération nationale des lieux de vie

Tout d’abord, qu’est-ce qu’un lieu de vie et d’accueil (LVA)?

Il y a les MECS (NDLR : Maisons d’Enfants à Caractère Social, établissements sociaux ou médico-sociaux, spécialisés dans l’accueil temporaire de mineurs en difficulté), il y a les familles d’accueil et nous, on est à mi-chemin, on peut accueillir maximum 7 personnes. La loi dit que les lieux de vie et d’accueil sont animés par des permanents dont au moins l’un d’eux réside sur le site d’implantation. À 80 %, ils accueillent des mineurs ou des jeunes adultes envoyés par l’aide sociale à l’enfance ou la protection judiciaire de la jeunesse. 20 % des LVA sont destinés aux enfants handicapés.

Comment fonctionnent les LVA ?

Les LVA sont de petites structures atypiques liés à la personnalité des accueillants. Aucune n’est identique. On nous règle une prestation à la journée pour chaque mineur. Les LVA s’autogèrent financièrement, donc ne coûte presque rien aux départements, tous les investissements sont faits par les permanents. Je dis qu’on est des « bricoleurs » : face au public qu’on accueille notre savoir est utile mais ce n’est pas suffisant pour permettre la résilience d’enfants en souffrance. On se sert de nos expériences pour essayer d’inventer des réponses au cas par cas. On s’adapte. Comme on est autonome, on a cette capacité de pouvoir répondre rapidement à des besoins et des problématiques. Un jeune a besoin d’un scooter pour sa formation professionnelle, on lui achète. On a des jeunes qui peuvent rester un jour comme 10 ans, des mineurs comme de jeunes adultes. En fait, on a une vie tout à fait ordinaire.

Combien de LVA trouve-t-on en France ?

On n’en sait rien ! Il y en aurait environ 400 mais les départements, qui gèrent l’aide sociale à l’enfance, ont du mal à faire remonter les chiffres. Au départ, la loi de 2002 précisait bien qu’il faut qu’une personne vive sur place. Maintenant, il y a des structures qui se sont multipliées sous la pression de certains départements où personne ne vit sur place. Ce sont des personnes qui se relaient pour y dormir. Même si les LVA classiques restent majoritaires, le rôle de la fédération est de veiller à ce que la loi soit respectée.

Justement quels sont les objectifs de la Fédération ?

On voudrait une remise à plat de la réglementation, une redéfinition du cadre législatif. On a prévu d’établir une feuille de route avec le Secrétaire d’Etat chargé de l’enfance, Adrien Taquet, la mise en place d’une commission qui pourrait établir la sécurisation juridique des LVA. Car les textes actuels sont ambigus ou sont contredits par la réalité. Notre position est soit de requalifier les structures, soit on crée des catégories pour que les travailleurs sociaux puissent s’y retrouver et savoir où ils vont travailler.  Ce n’est pas la même chose un LVA avec un couple et une maison habitée et incarnée et une structure où quatre éducateurs se relaient pour dormir. Il y a un vrai problème pour recruter des éducateurs, c’est une profession qui n’a pas été revalorisée depuis des années. Les conditions de travail se sont dégradées et le salaire est minable. Il faut aussi changer ça.

Propos recueillis par Sarah Nabli                                         La Dépêche