Tout savoir sur les phosphatières du clou d’Aural

Les Phosphatières du Cloup d’Aural dans le sud du Lot proposent un voyage dans le temps à 30 mètres de profondeur dans un gouffre à ciel ouvert…

Le présent s’éloigne à mesure que l’on descend dans les entrailles de la terre. Aux Phosphatières du Cloup d’Aural, à Bach, dans le Lot au sud du Parc Naturel des Causses du Quercy, on remonte alors le temps, du XIXe siècle, époque à laquelle était exploitée cette ancienne mine de phosphate, puis bien plus loin encore, du jurassique au crétacé.

Ces véritables gouffres à ciel ouvert forgés par la main de l’homme au XIXe siècle, descendent à une trentaine de mètres de profondeur. À mesure que le visiteur s’enfonce, la végétation change. Les chênes pubescents du causse et érables de Montpellier laissent place à des fougères et mousses à foison, l’humidité augmente, la fraîcheur se fait sentir. En fonction de la période de l’année, il y fait 10 à 15 °C.

Anciennes mines prospères

Les phosphatières étaient d’anciennes mines de phosphate exploitées à la fin du XIXe siècle. À l’époque, les engrais chimiques n’existaient pas et le phosphate servait à fertiliser les champs. Une aubaine pour ces paysans du Quercy qui l’envoyaient en Angleterre, en pleine Révolution industrielle, qui avait besoin d’engrais en grande quantité. Pendant 20 ans, les hommes sont venus creuser les poches d’argile et en retiraient le minerai riche en phosphate. Les outils étaient rudimentaires : pelles, seaux, treuils. Aujourd’hui, un de ces treuils actionnés à l’époque par la force animale a été reconstitué aux Phosphatières du Cloup d’Aural, témoin d’un passé révolu…

Tandis que les hommes creusaient au fond du trou, les femmes et les enfants triaient cet argile pour en extraire la phosphorite. La 1re phosphatière a été découverte par Jean-André Pomarède en 1865. Et pendant près de 20 ans, les hommes, paysans pauvres d’un Quercy aux terres peu fertiles, se sont improvisés mineurs et ont extrait du sol le précieux minerai. Jusqu’à 2000 mineurs ont travaillé dans 300 phosphatières à ciel ouvert. Puis, des gisements de phosphore ont été découverts en Afrique du Nord. Plus accessibles, plus faciles à exploiter, ils ont signé la fin des phosphatières du Causse du Quercy.

Peu à peu, ces phosphatières sont tombées dans l’oubli, plusieurs servant de décharges sauvages dans la 2e moitié du XXe siècle. Quelques passionnés ont décidé de faire connaître cette histoire et ont créé une association « Phosphatières du Quercy », afin de faire revivre ce passé, et ont dégagé et aménagé la phosphatière du Cloup d’Aural avant de l’ouvrir à la visite.

Fossiles à foison

Dans ces poches argileuses, de nombreux fossiles ont été retrouvés. Le phosphate a permis une très bonne conservation de ces fossiles, datés de 30 à 50 millions d’années. Les phosphatières permettent ainsi l’étude de l’évolution sur une vingtaine de millions d’années.

Sur les 300 phosphatières du Quercy, 200 ont été étudiées par les paléontologues. Les premiers fossiles avaient été confiés aux scientifiques par les mineurs du XIXe siècle. C’est ainsi que des fossiles des phosphatières ont été disséminés jusqu’à Sydney ou Buenos Aires.

Certaines espèces ont d’ailleurs été retrouvées uniquement aux phosphatières, comme le « Cadurcoterium », la « bête sauvage de Cahors » (qui ressemblait à un rhinocéros sans corne). Les scientifiques sont revenus dans les années 70 et les recherches ont recommencé. Après un nouveau temps d’arrêt, elles ont été reprises au milieu des années 2000, organisées par le laboratoire de paléontologie de Montpellier. Depuis, les scientifiques de la France entière reviennent chaque été pour des campagnes de fouilles.

Néanmoins, aujourd’hui, on ne retrouve plus de gros fossiles comme à la grande époque des mineurs. Les paléontologues retrouvent plutôt de petits fossiles, parfois infra millimétriques, et découvrent des petits os, des insectes (coléoptères), graines (pépin de raisin)… Néanmoins, les techniques actuelles permettent de faire d’étonnantes découvertes sur les fossiles découverts des années auparavant, comme cette grenouille fossilisée entière, y compris son squelette à l’intérieur, ou encore cette salamandre dont on a pu découvrir les traces de repas dans l’estomac…

Recherches scientifiques et rencontres avec les paléontologues

Avec 50 ans de recherches aux phosphatières, des milliers de publications scientifiques ont été faites, des dizaines de thèses soutenues. Près de 700 espèces d’être vivants ont été identifiées sur les 200 phosphatières… Peu de sites dans le monde peuvent se targuer d’une telle richesse. Ces phosphatières sont d’ailleurs aujourd’hui protégées par la Réserve naturelle d’intérêt géologique et bénéficient du label Géoparc de l’Unesco.

Cette année, la campagne de fouilles se déroule du 8 au 20 juillet 2019. Durant cette période, les paléontologues ouvrent leur laboratoire aux visiteurs, leur font découvrir leurs méthodes de travail et partagent avec eux le résultat de leurs recherches.

Reste que les phosphatières sont encore loin d’avoir révélé tous leurs secrets. Outre l’aspect paléontologie, la biologie des phosphatières, notamment au niveau de la flore ou de la faune, reste à approfondir. Un entomologue est d’ailleurs venu faire une étude au printemps 2019.

Un site en pleine évolution

Aujourd’hui, le site est aménagé pour une visite à la fois ludique et instructive. 14 000 visiteurs le découvrent chaque année, dont 3 000 scolaires.

Des travaux d’aménagements ont été effectués au printemps dernier par la communauté de commune de Lalbenque-Limogne pour accueillir au mieux les visiteurs. Les escaliers ont été refaits, tout comme plusieurs plateformes d’accueil des visiteurs.

Dans les années à venir, les Phosphatières vont encore évoluer. Au 2e semestre 2020, un tout nouveau parcours extérieur verra le jour, remplaçant le parcours libre existant. Une troisième phase d’aménagement est aussi à l’étude, avec la création d’un musée à part entière.

Visite libre

Une fois la visite terminée (ou en attendant la prochaine), il est possible de cheminer librement le long de sentiers thématiques, pour une durée de 30 minutes à 2 h.

Ces sentiers permettent de découvrir l’histoire et les usages du phosphate d’hier à aujourd’hui, l’histoire et les animaux du Quercy, les découvertes paléontologiques, la découverte de la flore et la faune des phosphatières ou encore les animaux du passé, avec des silhouettes à taille réelle pour se rendre compte des animaux qui vivaient là il y a plusieurs millions d’années.

Pour les enfants, plusieurs jeux sont proposés, ainsi que des ateliers découverte du 18 juillet au 16 août, comme un atelier paléontologie avec les animateurs du site, ou encore un atelier découverte de l’argile pour toute la famille les jeudis. Sur l’aire de pique-nique, des petits jeux sont aussi proposés, comme un tableau pour dessiner à l’argile ou encore un bac de fouille pour découvrir seul des fossiles.

Car c’est là toute la force des phosphatières du Cloup d’Aural, savoir éduquer et partager des connaissances tout en profitant d’un moment ludique et sympathique… dans la fraîcheur des roches du Quercy.

Les Phosphatières du Cloup d’Aural sont situées dans le sud du Lot entre Bach et Varaire sur la RD 19. Ouvert du 1er avril au 3 novembre.
En juillet et août, les visites guidées ont lieu toutes les heures de 10 h à 17 h. Durée de la visite guidée : 1 h, qui peut être complétée par la visite libre des sentiers aménagés. Tarifs : adultes 8 € / jeunes et étudiants 7 € / enfants (6-14 ans) 5 € / gratuit moins de 6 ans. Prévoir vêtements et chaussures adaptés. Sur place boutique, buvette, aire de pique-nique ombragée, parking gratuit.
Rens. 06 03 93 45 91 /Phosphatières du Cloup d’Aural

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