Une chanson pour l’Ukraine devient un hymne de résistance

C’est l’histoire d’une rencontre. À l’Est, en Ukraine, le lieutenant-colonel Taras Borovok, servant dans le commandement des forces terrestres ukrainiennes. Il est l’homme qui dynamise l’engagement des soldats et qui conforte la résilience de son peuple. Aux premiers jours de la guerre, il conçoit un hymne de résistance surnommé « Bayraktar », du nom des drones turcs utilisés par l’armée ukrainienne. Il est alors diffusé par toutes les radios ukrainiennes et à l’international sur les réseaux sociaux. À l’Ouest, en France, Lisa Schettner, Gourdonnaise, auteure-compositrice-interprète, aussi connue sous le nom d’Elisabeth ou encore Liz. Lorsqu’elle apprend l’agression russe, elle compose, en une nuit, la chanson « Hands Off Ukraine » qu’elle publie sur YouTube.

Une semaine plus tard, Taras Borovok est subjugué en visionnant le clip de Lisa. Ils se lient virtuellement et c’est l’entente immédiate. Décidant alors de mélanger leurs rythmes et paroles, ils produisent ensemble « Bayraktar Mashup Edition ». Sur la chaîne YouTube de la Gourdonnaise, le clip cumule 70 000 vues à l’heure actuelle. Rencontre avec ces deux personnalités.

  • Lisa, pourquoi cet engagement ?

Ma chanson est dédiée aux personnes qui ne peuvent plus parler, à toutes les victimes qui souffrent des régimes totalitaires, comme mon grand-père, engagé dans la résistance, à qui je dois cette flamme nommée liberté. J’aime imaginer qu’ils parlent à travers moi.

  • Jusqu’où êtes-vous prête à aller pour la cause ukrainienne ?

J’aimerais pouvoir répondre fièrement « par tous les moyens et jusqu’au bout ». Mais je ne pourrais mentir, j’ai reçu des menaces dissuasives qui me font réfléchir. Cependant, si je me laissais intimider, je ne pourrais plus me respecter. L’Ukraine est victime d’une atroce agression, injustifiable, et je veux continuer à soutenir leur cause. Tout comme agir contre toute injustice, contre la brutalité humaine, nature incluse. Je ne peux pas porter de fusil, mais mes chansons peuvent aller plus loin qu’un projectile.`

  • Taras, qu’est-ce que Lisa vous a apporté ?

Élisabeth Schettner m’a suggéré de créer une combinaison de sa chanson Hands Off Ukraine avec l’hymne Bayraktar. Nous l’avons fait, puis nous avons commencé à parler d’autres sujets. Après tout, c’est la guerre en Ukraine qui nous a présentés l’un à l’autre. De ma conversation avec Liz, j’ai compris que les Français sont des gens intelligents, éduqués et lucides, qu’ils comprennent les injustices de la guerre russe, et soutiennent l’Ukraine.

  • Vous considérez-vous comme un propagandiste ?

Avec une formation militaire supérieure, diplômé de l’académie militaire, de philologie, de psychologie et en journalisme, j’ai combiné la créativité, la psychologie, le journalisme et les affaires militaires. C’est la recette pour être un propagandiste militaire idéal. Avec la propagande, vous pouvez convaincre toute une nation de haïr les autres nations et d’aller tuer, violer, torturer, détruire… Mais la propagande peut aussi être utilisée avec de bonnes intentions : s’entraider, développer son pays et les relations avec les autres Etats. C’est ce que je fais. Je participe à la production d’un certain nombre de documentaires qui éclairent le monde sur la défense de l’Ukraine, sur les crimes militaires, politiques, sociaux et sexistes de l’armée russe. Le monde doit connaître toutes les horreurs que les nazis russes commettent dans notre pays. C’est pourquoi il est très important de transmettre les bons messages et informations afin que notre peuple sente la fiabilité de nos soldats, croit en la victoire et soit motivé pour aider nos forces armées. Et maintenant, notre nation est plus unie que jamais.

Patrick Leleu                                                  La Dépêche 

Le lieutenant-colonel ukrainien Taras Borovok. crédit photo : DR/DDM

https://fr.lisaschettner.com