Lot : Histoire de ses bastides

Pourquoi les bastides ont-elles été fondées ?

Entre 1220 et 1370le Sud-Ouest est partagé entre Français et Anglais. Les Capétiens et les Plantagenêts cherchent ainsi à ancrer leur pouvoir politique et économique. Les 2 monarchies créent près de 300 villes nouvelles, les bastides, là où n’existait qu’un habitat dispersé.

Certaines bastides, au cours de leur histoire, furent Françaises, puis Anglaises, comme Castillonnès ! En effet, Alphonse de Poitiers (qui a aussi fondé la bastide de Villeréal) accorda la charte des coutumes à la bastide en 1266. Mais quelques années plus tard, Edouard II d’Angleterre, duc d’Aquitaine, annexa de nombreux bourgs du bailli agenais et Castillonnès devint anglaise en 1318. En 1368, Edouard de Woodstock, aussi appelé le Prince Noir, son petit-fils, confirma la charte des coutumes. La bastide redevint française quelques années plus tard : en 1372, Louis d’Anjou renouvelait la charte.

Les bastides constituaient donc des centres de peuplement et d’échanges commerciaux. Elles étaient destinées à regrouper des paysans, commerçants et marchands pour mettre en valeur des terres agricoles et occuper un territoire convoité.

La place du marché y occupe une position centrale

La bastide se construit parfois autour d’un élément préexistant : une église ou un château.

Les maisons doivent être à l’alignement. Leurs façades latérales sont parfois séparées par des andrones, interstices d’une trentaine de centimètres qui forment un pare-feu contre les incendies qui ne sont pas exceptionnels. Ce vide sert aussi d’égouts, voire de latrines.

Chacun, en effet, n’est pas libre de bâtir ce qu’il veut sur son sol, mais doit se plier à une sorte de cahier des charges qui fait que la bastide n’est pas seulement une opération immobilière à but lucratif. C’est aussi une œuvre qui tente une synthèse de la régularité et de l’esthétisme.

C’est le bayle, gestionnaire et défenseur des droits, qui doit trouver un équilibre entre les libertés qu’il faut offrir pour attirer des habitants et les contraintes qu’il faut leur imposer pour conserver les traits originaux de la bastide. Tout est affaire de dialogue entre les nouveaux arrivants et le bayle.

L’emplacement d’une bastide qui a fait l’objet de toutes les attentions, donne la priorité au commerce. On a privilégié un lieu situé au carrefour de voies commerciales fréquentées.

Si parfois il s’en éloigne en raison de la nature du site choisi, le plan des bastides doit se rapprocher de l’échiquier carré ou rectangulaire pour des possibilités maximales de peuplement ou de défense.

Le plan le plus courant est un quadrilatère aux rues rectilignes se coupant à angle droit avec les ruelles adjacentes.

Le centre de la bastide est toujours occupé par une place carrée entourée souvent de galeries couvertes (les cornières) avec une halle en bois utilisée pour les marchés.

Au cœur du village trône alors la maison commune, qui abrite le pouvoir et la vie de la cité. Ici, c’est le vide qui est central. Mais ce vide est conçu de manière dynamique. Il est appel, lieu d’attraction qui porte en lui toutes les convergences à venir, celles des habitants et celles des marchands. C’est la place.

Les douze bastides du Lot

Quelques villages actuels de notre département sont des bastides, même si certaines ont perdu leur aspect primitif.

Ce sont de paisibles bourgs qui ont parfois gardé leur halle : Labastide-Murat dressé sur une harmonieuse hauteur du causse de Gramat, Labastide-du-Vert, Labastide-Marnhac, Puybrun, Beauregard, Castelfranc, Monfaucon.

D’autres ont conservé un plus riche passé médiéval : sur l’axe de communication entre le Rouergue et Rocamadour, Rudelle, créé sous Roland de Cardaillac seigneur de Lacapelle-Marival, a une implantation stratégique pour assurer une protection avancée grâce au « fort-église » saint Martial encore visible de nos jours. La halle disparue en 1964 était positionnée le long de la voie principale.

Montcabrier, fondé en 1297 par le sénéchal Guy de Cabrier, fut doté en 1304 d’une franchise du roi Philippe le Bel. Autour de la place, quelques maisons anciennes occupent encore le tracé régulier du plan d’origine.

Cazals, bastide fondée en 1319 pour le roi d’Angleterre, s’organise autour de sa grand-place carrée. L’ancien château domine un plan d’eau aménagé au bord de la Masse.

Baignée d’eau et de verdure, Bretenoux fondée en 1277 par un puissant seigneur, Guérin de Castelnau, a conservé son plan en damier, sa place centrale entourée de couverts et des restes de remparts.

À Castelnau-de-Vaux établi en contre-bas de la colline et totalement détruit par les troupes de Simon de Montfort en 1214, succède vers 1250 Castelnau-Montratier, bastide édifiée par Ratier, seigneur de Castelnau. Elle connaît alors une période de prospérités : ses foires réputées attirent marchands de laine et d’étoffes. De nombreux marchands campent sous les couverts de sa place triangulaire. Mais les conflits successifs vont définitivement ternir cet éclat.

Les bastides pour faire vivre les terroirs

Les bastides sont l’une des facettes d’un développement rural qui renouvelle totalement la répartition du peuplement du sud-ouest de la France.

Dans le riche passé culturel du Lot, les bastides tiennent une place à part tant dans leur structure que par leur esprit propre. Elles avaient pour objectif d’associer autorité publique et propriétaires fonciers. « Faire vivre les terroirs » en était le but. Un thème toujours d’actualité aujourd’hui.

D’après un article d’Actulot journaliste André DECUP

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André DÉCUP